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Le 26 août 2014 peu après 13 heures, Hocine Bouras, 23 ans, est extrait de la maison d’arrêt de l’Elsau à Strasbourg pour être auditionné par un juge d’instruction à Colmar, dans le cadre d’une mise en examen pour des faits de vol à main armée (braquage d’un Quick avec une arme factice). Transporté par une voiture de gendarmerie, celle-ci emprunte l’autoroute A35. Il n’y a que deux gendarmes à l’intérieur : l’un au volant, l’autre assise à l’arrière à la gauche d’Hocine Bouras. Peu avant l’entrée dans Colmar, l’estafette s’arrête sur la bande d’arrêt d’urgence et le gendarme au volant, adjoint volontaire, dégaine son arme de service et tire dans le visage d’Hocine, qui meurt aussitôt.

La version donnée par les gendarmes et servie aux médias par le procureur Bernard Lebeau parle d’une bagarre qui aurait éclaté entre Hocine et la gendarme placée à côté de lui. Les gendarmes prétendent que Hocine aurait tenté de saisir son arme de service, avant de la laisser tomber et que le conducteur aurait échoué à le tirer hors de la voiture et à le maîtriser à l’aide de sa matraque. Hocine aurait alors agrippé la gendarme qui, coincée par son corps et penchée hors de la voiture, aurait tenu l’arme à bout de bras avant d’essayer de la jeter sous le véhicule pour qu’elle soit hors de portée, en criant “il va me tuer”. Le conducteur aurait alors tiré pour défendre sa collègue.

Hocine était pourtant menotté. Il est peu crédible que Hocine ait pu, les mains menottées (dans le dos selon un témoin), s’emparer de l’arme pour menacer les gendarmes. Et il suffit que Hocine ait effleuré l’arme pour que son ADN se retrouve dessus. Il n’est pas à exclure non plus que, en l’absence de témoins, le crime ait pu être camouflé en légitime défense, pour disculper l’auteur du tir. Mais cette hypothèse ne sera jamais évoquée.

Placé en garde-à-vue, le gendarme est finalement placé sous le statut de témoin assisté au lieu d’être mis en examen pour “violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner”, comme l’avait requis le Parquet.

Le 31 août 2014, les proches d’Hocine organisent une marche pour lui rendre hommage, à laquelle participent 150 personnes. Par la suite, le collectif organise et participe à de nombreux événements et mobilisations contre les violences policières.

Les proches d’Hocine sont défendus par Me Renaud Bettcher.

En novembre 2015, le procureur renonce à poursuivre le gendarme, affirmant qu’il y a bien légitime défense puisque les expertises démontreraient qu’Hocine a bien touché l’arme de la gendarme assise à l’arrière avec lui.

Le 19 janvier 2016, les juges d’instruction Jean-François Assal et Stéphane Galland rendent une première ordonnance de non lieu, considérant comme incontestable le fait qu’Hocine aurait agressé la gendarme. La famille d’Hocine fait appel.

Le 8 septembre 2016, l’ordonnance de non-lieu est confirmée par la chambre de l’instruction. La famille se pourvoit en cassation et dépose deux plaintes, l’une pour destruction de preuves à l’encontre de la témoin et l’autre pour faux en écriture publique : le téléphone de la témoin (la gendarme) a été entièrement réinitialisé la veille de son audition par ses collègues de la gendarmerie et les gendarmes ont bien trouvé le conducteur de la voiture qui dépassait le véhicule de gendarmerie au moment des faits, mais n’ont pas procédé à son audition et ont fait constater qu’il y avait eu de vaines recherches.

La Cour de cassation examine le dossier le 14 novembre 2017.

Le 10 janvier 2018, elle rejette le pourvoi des proches d’Hocine Bouras, confirmant définitivement le non-lieu. L’auteur du tir, qui a quitté la gendarmerie en 2015, est donc disculpé.

 

Le site internet des proches de Hocine Bouras : https://justicepourhocinebouras.wordpress.com/

La Page Facebook du collectif : https://www.facebook.com/collectif.hocine.bouras/


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