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TW : Les vidéos en lien contiennent des images de violence extrême, la lecture des récits peut être très violente elle aussi. 

La Colombie est secouée depuis fin avril par la Paro Nacional (grève générale), révolte populaire faisant suite à une réforme fiscale, à laquelle doivent succéder des réformes des systèmes de santé et de retraiteLa population s’oppose au gouvernement par des manifestations massives, violemment réprimées par la police nationale et en particulier par ses escadrons antiémeutes, les ESMAD (Escuadrón Móvil Antidisturbios), des unités de police militarisées qui s’illustrent par leur ultra-violence. 

Selon le média en ligne La Oreja Roja, le bilan s’élevait au 10 mai 2021 à 980 disparitions signalées, dont 109 toujours en recherche active, 962 arrestations arbitraires, 1443 victimes de violences policières, 111 usages d’armes à feu contre des civils (canal @laorejaroja sur Instagram), 16 victimes d’abus sexuels commis par les forces de l’ordre, et finalement 47 victimes d’homicides, dont 37 manifestant.e.s tué.e.s par la police ou les ESMADDès le 28 avril, 1er jour des mobilisations, 9 personnes ont été tuées.

En recoupant avec d’autres sources, nous avons décompté un total de 63 personnes assassinées lors des mobilisations pour la grève générale : 34 par la police et les ESMAD, 10 par des civils armés et 19 sans responsables identifiés. Six victimes étaient par ailleurs encore cours d’identification. Sur la même période, nous avons décompté 67 blessés graves : 51 par la police et les ESMAD et 16 par des groupes civils armés. Plusieurs personnes blessées sont toujours en réanimation. 

Il est également important de prendre en compte les disparitions de personnes que l’on peut considérer comme de potentielles victimes des forces armées si elles n’apparaissent pas encore. De nombreuses demandeur.euses d’asile colombien.nes réfugié.es à l’étranger font état des pratiques des groupes paramilitaires, qui enlèvent des personnes dont les corps sans vie sont retrouvés par la suite en périphérie des zones habitées, et notamment dans des cours d’eau.

Depuis 1999 jusqu’à aujourd’hui, on décompte au moins 62 victimes connues des forces de l’ordre en Colombie. Plus de la moitié des victimes ont été tuées ces trois dernières semaines, depuis le début du paro nacional durant lequel les ESMAD se sont illustrés comme les unités de police les plus violentes et meurtrières (responsables de 21 assassinats sur les 27 imputables aux forces de l’ordre.).

Les ESMAD : un historique sanglant

 

Les ESMAD ont été créés le 24 février 1999, tout d’abord de manière transitoire, à l’occasion d’un plan de modernisation de la police nationale. Au départ, cet escadron était composé de neuf officiers, huit sous-officiers et 200 patrouilleurs. Sa mission était de soutenir les départements et les polices métropolitaines dans la gestion et le contrôle des foules et de spectacles publics”

Le 14 avril de la même année, le directeur général de la police décide de péreniser ces escadrons mobiles antiémeute. Cette unité devient alors l‘organe central du maintien de l’ordre dans les principales régions de Colombie. Malgré les plaintes des organismes de défense des droits humains (Amnesty International a dénoncé les exactions des ESMAD lors d’un précédent mouvement de grèves en novembre 2019), les ESMAD continuent de sévir et ont même renforcé ses effectifs pour atteindre, en octobre 2019, un total de 3876 policiers. Un effectif multiplié par 18 en vingt ans d’existence.

Les ONG et la presse indépendante les appèlent sans complexe “les escadrons de la mort” (El escuadrón de la muerte). Entre 1999 et 2019, les ESMAD ont tué 18 personnes seulement à Bogota, dont onze étudiants et une personne mineure. Ils ont soit été roués de coup jusqu’à ce que mort s’en suive ou ont été victimes darmes soi-disant “non létales” (bombes lacrymogènes, balles/billes utilisées pour le maintien de l’ordre, ou autres “armes non conventionnelles” comme des piles, vis, billes, ou liquide explosifs…

Des exactions ont également été commises dans les zones rurales du pays. La grève agricole de 2013 a été l’occasion d’attaques incessantes des ESMAD, qui ont donné lieu à 660 cas de violations des droits humains (individuels ou collectifs), 262 arrestations arbitraires, 485 blessés (dont 21 par balles), 52 cas de harcèlement et de menaces, recensées par trois sources indépendantes que nous avons recoupé (ICI ; LA ; et encore ICI).

Le maintien de l’ordre” appliqué aux étudiants et aux mobilisations sociales en général est excessivement violent. Les ESMAD justifient leur violence par la présence d’encapuchado (personnes se dissimulant le visage) au sein des cortèges, version largement relayée par les médias colombiens. Chaque pays semble avoir sa figure du “casseur”, permettant de justifier la violence d’Etat. Il est inutile de préciser que, tout comme en France, la police colombienne bénéficie d’une impunité totale.

Lors des révoltes étudiantes de 2018, un étudiant nous indique qu’à sa connaissance, il y a eu plus d’une centaine de blessés, et plusieurs personnes ont été mutilées. Les victimes sont le plus souvent éborgnées par des tirs tendus de grenades lacrymogènes, tirées à hauteur de visage et à moins de 30 mètres de distance. Notre témoin relate également un usage massif de grenades assourdissantes qui provoquent blessures graves et mutilations. 

Le 2 octobre 2019, des étudiants d’universités publiques et privées ont déposé une plainte conjointe contre l’ESMAD pour des exactions commises lors des manifestations contre la corruption des 23, 25 et 26 septembre 2019. Iels dénoncent un usage disproportionné de la force (usages de gaz lacrymogènes dans des lieux clos), l’utilisation d’armes nonconventionnelles (évoquées plus haut) et des attaques contre les secouristes (dont celle d’une ambulance). L’un des témoignages évoque des “scènes d’horreur”.

Voici quelques cas bien documentés d’exactions des ESMAD lors du mouvement social étudiant de l’automne 2019 :

  • Le 25 novembre 2019: Dylan Cruz, 18 ans, qui manifestait pour le droit à l’éducation en Colombie, est mortellement touché par un policier de l’ESMAD; il lui a tiré en pleine tête une cartouche contenant des chevrotines en plomb. Le 20 Mai 2021, sur la place de l’université de Rosario, une statue de Dylan est érigée à la place de celle de Gonzalo Jimenez, colon espagnol. Cette statue est un hommage à toutes les victimes des violences d’état en Colombie.

  • L’UNEES (syndicat national des étudiants de l’enseignement supérieur), suite aux mobilisations du 10 octobre 2019, décompte plus de 50 étudiants blessés et 89 arrêtés. Elle dénonce des attaques policières sur plus de 15 établissements universitaires, des blessures graves pouvant entraîner la perte d’un oeil, des arrestations préventives, des observateurs des droits de l’Homme violentés, et d’innombrables cas d’usage disproportionné de la force. Son porte parole national Ivan Buiutrago demande la dissolution immédiate de l’ESMAD : Il n’y a pas une mobilisation sans que ces escadrons fassent irruption, perturbent et abolissent l’expression populaire de nos revendications.

  • Le 19 mai 2020 : Anderson Arboleda, 24 ans, est frappé par un policier, à plusieurs reprises à la tête avec un marteau en bois. Officiellement, ce serait pour non respect de la quarantaine, alors que c’est un acte purement raciste. Trois jours plus tard, Anderson est déclaré en état de mort cérébrale à l’hopital. (Source)

  • La seule journée du 9 septembre 2020 est particulièrement meurtrière : Jaider Fonseca, 17 ans, est à son tour assassiné par une balle de la police durant une des manifestations en mémoire à Javier Ordóñez (Source); Julián González, 27 ans, qui prenait également part aux manifestations, est tué par la police de deux balles dans l’abdomen (Source); Julieth Ramírez, 18 ans, qui n’était pas manifestante ce jour-là, sera victime d’une “balle perdue” tirée par la police qui l’atteint dans le thorax. (Source).

  • Dans la nuit du 7 au 8 septembre 2020, Javier Ordóñez, un avocat de 44 ans, décède à l’hôpital peu après son arrestation par la police colombienne pour contrôle en relation avec la pandémie de covid. Deux policiers l’ont plaqué au sol et lui ont administré pendant deux minutes des décharges avec des pistolets à impulsion électrique. Javier Ordóñez et des témoins qui filment la scène demandent aux policiers d’arrêter. Javier est ensuite transféré dans un commissariat, puis à l’hôpital, où son décès est constaté quelques heures plus tard. L’arrestation, diffusée sur les réseaux sociaux, choque le pays et déclenche dix jours de manifestations. Le bilan de la répression policière est terrible : 13 personnes sont tuées et 248 sont blessées dont 58 par armes à feu.

  • Le 25 juin 2020, Duván Aldana, 15 ans, est assassiné par un ESMAD d’une balle dans le cou. L’escadron était sur place pour expulser des voisins. (Source

2021 et le Paro nacional : intervention de polices parallèles

Chaque mouvement social est réprimé dans le sang par les forces de l’ordre colombiennes. Le plus inquiétant, c’est l’apparition depuis le début du mouvement du Paro nacional, de groupes de “para-civilss’apparentant à des milices parallèles.

Nous pouvons citer par exemple Peireira, ville du centre du pays comptant environ un million d’habitants, dans laquelle existe une tradition de ce qu’on appelle des “meurtres commandités”. Dans un article le professeur d’Université Luis Adolfo Martínez explique que “les assassinats de simples habitants ont commencé à apparaître dans les années 1970, tandis que dans les années 1990, les meurtres commandités sont en général effectués avec des armes de police détournées pour usage privé.” 

Tout récemment, le 2 mai 2021, Carlos Maya, le maire de Pereira, a ravivé cette tendance lors d’un discours public en appellant “les groupes et membres de la securité privée à faire front commun avec la police et l’armée pour récupérer l’ordre public.” (Source). Cette incitation à la violence semble avoir fonctionné, comme en témoigne un homme armé dans une vidéo publiée par Oreja Roja, déclarant patrouiller dans un quartier riche de la ville et mettant en garde : “Les vandales, retirezvous s’il vous plaît. Nous ne permettrons plus qu’aucun bien ne soit endommagés. Nous sommes armés et nous sommes prêts. Bonne journée”

Un autre journal en ligne, La Silla vacia, a eu accès à un message vocal circulant sur whatsapp tout aussi menaçant : Faites attention, jeunes manifestants, à partir d’aujourd’hui 2 mai 2021, chaque ami encapuchado que nous attraperons à vandaliser, voler et s’adonner dans la ville à des attaques terroristes sera à notre entière disposition“.(Source).

Ces menaces se sont malheureusement converties en actes, notamment par  une multiplication d’agressions et de meurtres. Lucas Villa Velasquez, 37 ans, a été assassiné par un de ces groupes le 5 mai 2021 sur un viaduc entre Dosquebradas et Pereira. Sa mort a suscité une vive indignation et Lucas est devenu un symbole de la violence sanglante que subissent les manifestant-e-s. 

Dans le quartier de La Luna à Cali, métropole de l’est du pays, dans la nuit du 7 au 8 mai 2021, des civils sont attaqués conjointement par la police et des groupes civils armés. Plusieurs manifestants sont blessés gravement par des tirs à balle réelle. La Minga Indigena, un collectif d’organisations indigènes opposées aux différents gouvernements colombiens, vient au secours des manifestants mais est à son tour attaquée.

Elle arrive cependant à arrêter certains de ces miliciens et à les retenir dans une maison. On note que l’armée colombienne est présente dans le secteur (vidéos : 1, 2, 3)

Le 9 mai, sur la carretera Panamerica, la Minga Indigena subit une nouvelle attaque en plein jour par des groupes armés de civils d’extrême-droite qui veulent empêcher son passage avec la complicité toujours active de la police

Au bilan, 12 blessés sont à déplorer : Segundo Pequí Ramos, Alexander Frider Yule Ramos, Kevin Antonio Mora, Pedro Herney Ramos Perdomo, Dubán David Ciclos Ñuscue, Educardo Ul Ul, Yerson Javier Tálaga Ulcué, Marlon Yesid Matínez Canas, Jerson Ignacio Tróchez Tenorio, Sandro Leonel Camayo Ipia, Iván René Casso Hurtado et Daniela Soto (Source 1, 2)

Les exactions de paramilitaires, qui faisaient l’histoire de la Colombie, refont ici surface avec l’émergence de milices armées agissant contre les manifestations, avec la bienveillance et la complicité des forces de l’ordre et de ses dirigeants. 

Crimes et agressions sexuelles

En Colombie, 3 agressions sexuelles sont signalées chaque heure. De 2014 à 2020, 288 enquêtes ont été menées contre des membres des forces de l’ordre colombienne pour des violences ou des abus sexuel.le.s sur personnes mineures. Les institutions les plus visées sont la police nationale et l’armée. Entre 2017 et 2019, 102 faits de violence sexuelle commises par la police et l’ESMAD ont été enregistrés par la médecine légale en Colombie, et 30 en 2020. Depuis le début de la dernière vague de manifestations, ces agressions se sont multiplées, les agresseurs restant principalement des agents de la police ou de l’ESMAD. 

Depuis le 28 avril 2021, 21 agressions sexuelles commises par les forces de l’ordre ont été dénoncées sur les réseaux sociaux et les plateformes de défenses des droits humains. 

Durant la nuit du 12 au 13 mai 2021, à Popayan (sud-ouest du pays)Alison, mineure, est arrêtée par l’ESMAD pour avoir simplement filmé une de leurs interventions, puis elle est conduite à 21h10 dans une unité de police judiciaire dédiée à “l’écoute des victimes”, l’URI (Unidad de Reacción Inmediata). Elle y sera agressée sexuellement et/ou violée par quatre agents de l’ESMAD avant d’être ensuite reconduite chez sa grand mère à 23 heures. Alison s’est suicidée le lendemain de l’agression.

Juste avant de s’enlever la vie, elle a écrit ces mots sur un réseau social : “Au mileu de tout ça, ils m’ont baissé le pantalon et m’ont molesté jusqu’au plus profond de mon âme, sur la vidéo je leur dis clairement de me lâcher car ils étaient en train de me dénuder en enlevant mon pantalon.

Cette agression est d’abord niée par la police, puis dans l’après midi du 15 mai les quatres agents mis en cause sont relevés de leurs fonctions. Nous ne donnerons pas l’identité complète de la victime à la demande de sa famille, tout comme nous ne mettrons pas de lien vers la vidéo qui atteste des faits car Alison était en situation de vulnérabilité et sa famille tient à ce que ça ne soit pas les dernières images que l’on retienne d’elle. #NiUnaMenos 

Nous n’avons pas de chiffres concernant les agressions commises sur des personnes de la communauté LGBTQIA+, mais nous pouvons hélas supposer qu’ils sont également très élevés.

En Amérique latine et dans les Caraïbes, 1300 personnes LGBTQIA+ ont été assassinées entre 2014 et 2019, sans compter le Brésil et le Honduras, qui ont le taux d’assassinats le plus élévés.  Selon l’ONG Colombia diversa, en 2020, 75 personnes LGBTQIA+ ont été assassinées en Colombie et 516 personnes ont subi violences et préjudices. La Police est l’un des acteurs principaux des discrimations envers les personnes LGBTQIA+. Depuis 2015, 466 personnes LGBTQIA+ ont été victimes de violences policières et, en 2020, 20 plaintes ont été déposées pour dénoncer des faits de violences concernant 27 personnes LGBTQIA+.

Ce qui est arrivé le 14 juin 2020 à Alejandra Monocuco, ainsi qu’à Juliana Giraldo ou encore Luis Alvarez, vient confirmer cette suspicion, dans la mesure où ces faits résultent, en Colombie comme ailleurs, d’une transphobie structurelle. 

  • Alejandra Monocuco, femme transgenre de 39 ans, présentait une détresse respiratoire manifeste, avait peur d’être atteinte d’une forme grave du covid 19 et a donc appelé les secours. Les soignants ont refusé de la transporter à l’hôpital car elle était une personne transgenre, TDS et séropositive. Alejandra est décédée 40 minutes plus tard car elle n’a pas reçu l’attention médicale nécessaire à son état de santéElle est devenue un symbole de la lutte contre la transphobie en Colombie.

  • Juliana Giraldo, femme transgenre de 35 ans, a été abattue par un militaire lorsqu’en contrôlant son identité il s’est rendu compte de sa transidentité

  • Luis Alvares, 17 ans, a été agressé verbalement à plusieurs reprises par un de ses voisins de son âge à cause de son orientation sexuelle. Le 7 août 2020, Luis décide de se défendre et lui répond. L‘agresseur se saisit alors d’une machette et lui coupe la moitié d’un bras.

Les Etats-Unis et la France, fournisseurs officiel des tyranies

La police colombienne n’est pas pauvre en matériel répressif dernier cri. L’entreprise étasunienne Combined Systems, référence mondiale en la matière, fournit à la Colombie un certain nombre de matériels de guerre permettant à ses milices d’essuyer les révoltes dans le sang.

Le VENOM de CTS / Combined Systems – USA

Elle est dotée notamment d’une plateforme de lancement de cartouches et grenades, le VENOM, pouvant être fixée sur un tank ou sur un trépied. 

Cette nouvelle arme des ESMAD a été commandée en 2019 auprès de Vimad Global Services, entreprise espagnole de distribution. Le Venom a coûté 118 794,11 dollars en 2019 soit 445.478.080 millions de COP de nos jours, selon la réponse du Ministère de la Défense à un droit de pétition présenté par la Sixième Commission du Sénat le 28 octobre 2019

Venom est une plateforme de lancements composée de trois modules avec des angles de tirs différents (10°,20° et 30°),  chacun contenant 10 cartouches pour un total de 30 cartouches en aluminium à haute résistance pouvant contenir plusieurs type de munitions. Selon le distributeur de l’arme, chaque cartouche est assignée avec une adresse IP pour être déclenchée individuellement ou dans n’importe quelle séquence désirée par un contrôle à distance sous forme d’un joystick. Un lanceur modulaire compact de 10 munitions est également disponible. L’amplitude du tir est de 150 mètres, avec une option de lancement de 30 ou 150 mètres. Elle permet une utilisation de manière différée ou simultanée de plusieurs types de projectiles : des projectiles en caoutchouc qui explosent à visée maritime, des munitions à impact composées de plombs en caoutchouc ou de mousse, des cartouches fumigènes des cartouches assourdissantes et aveuglantes de type “Flash Bang” et enfin des munitions combinées composées de cinq cartouches de fumées et d’une cartouche “FlashBang”

Toujours selon le Ministère de la Défense, les ESMAD ont acquis deux types de munitions :

  • des cartouches fumigènes-lacrymogènes de 37 mm (franges bleues), composée de fumée et de gaz CS, chaque cartouches contenant 7 munitions d’une portée maximale de 200 mètres (Source fabricant)
  • des cartouches assourdissantes et aveuglantes de 37 mm (franges blanches), nommées “Flash Bang” dans le catalogue du fabricant. Chaque munition contient 4 projectiles en caoutchouc qui explosent séquentiellement sur des plages de 100 à 200 mètres, produisant une détonation, un flash lumineux et propulsant des palets de caoutchouc à haute vélocité. Ce dernier point n’apparait pas dans la réponse du Minestère de la défense, qui décrit ces munitions comme assourdissantes et aveuglantes, sans mentionner la projection d’éclats de caoutchouc (Source fabricant

Selon Vimad, «Ces systèmes sont idéaux pour le lancement de signaux d’avertissement ou d’alarme lors de contrôles ou de certaines tentatives d’approche d’un navire.  Ils ont la capacité de rendre l’usage de la force beaucoup plus efficace grâce à l’envoi précis de munitions dans les zones de troubles.»

Cette arme, utilisée également par la marine des Etats Unis, les Etats d’Israël et des Philipines, est bien entendu présentée comme non létale.

Les ESMAD ont utilisé cette arme le 1er et 4 mai à Bogota, et depuis le 12 mai à Popayan pour “disperser” les manifestations. Des images vidéos en témoignent : 1, 2, 3. Malgré l’absence de preuves formelles, l’analyse des circonstances permet de penser qu’elle pourrait être impliquée dans la mort de Brayan Fernando Niño Araque un jeune homme de 24 ans qui a reçu dans la tête un projectile lacrymogène tiré depuis un tank de l’ESMAD au coin de l’Avenue Calle 7 avec la carrera 20 dans le barrio Sosiego à Madrid, Cundinamarca, selon Cerosetenta. 

Le MIDS de Arquus (ex Renault Trucks Defense) – France

Le journaliste indépendant Maxime Reynié note également la présence de “véhicules de sécurité” de fabrication française lors des manifestations colombiennes, et notamment des MIDS  (Midlum Security) de Renault Trucks Defense (RTD). Bien plus qu’un véhicule autopompe (canon à eau), il s’agit aussi d’un centre de commandement mobile, “entièrement équipé pour assurer des missions C3I (command, control, communications & intelligence)”. 

Le blog Forces Opérations tenu par un “féru d’histoire militaire” précisait dés 2015 : Les forces de police de Colombie ont en effet pris livraison il y a quelques semaines de trois MIDS en version transport de troupes. Ces véhicules ont été commandés pour un coût de US$1.8m en mai 2014 suite à un appel d’offre remporté par RTD contre BAE Systems, Centigon Colombia (Cara Security Group) et Panamerican Security grâce à son moindre coût et du suivi technique offert. Ces véhicules permettront à l’ESMAD (Escuadrón Movil Antidisturbios), l’escadron mobile anti-émeutes, de transporter 10 hommes + 2 membres d’équipage dans un véhicule blindé dont la vitesse maximale atteint 100km/h, qui a une autonomie de 600km, qui peut franchir des flaques d’eau de 50cm de profondeur et peut passer par dessus des obstacles de 40cm de hauteur. Le gouvernement colombien projette de recruter 1 000 hommes supplémentaires pour l’ESMAD et voulait donc leur offrir un mode de transport adéquat.

Entre temps, Renault Truck Défense est devenu Arquus (pour “Arma et Equus”) en 2018.

Notons que le VENOM étasunien s’adapte très bien sur le toit du MIDS français, témoignant de la grande harmonie régnant entre les marchands de mort du monde entier…

Avec la militarisation des forces de police à travers le monde, incitée par le lobbying du complexe militaro-industriel, chaque mouvement social et chaque révolte populaire voit l’accumulation de cas de mutilations. En Colombie comme dans tous les pays confrontés à l’usage massif des balles de gomme, la liste des personnes éborgnées par des tirs de police s’allonge. 

En mars 2019, 5 personnes éborgnées étaient comptabilisées au cours des cinq mois précédents : Juan D. Henao (Bogota, 7 novembre 2018), Keiry Movilla (Bogota, 8 novembre 2018), Esteban Mosquera (Popayan, 13 décembre 2018), John Astudillo (Cauca, 1er mars 2019), Andrés Paja (Cauca, 5 mars 2019).

Le 5 mai 2021, la presse relayait les plaintes de 11 personnes éborgnées au cours de la mobilisation récente, relayant notamment le cas de Leidy Cadena, mutilée le 28 avril à Bogota, Daniel David Meléndez, mutilé le lendemain à Popayan, ou encore Juan Pablo Fonseca, mutilé le 1er mai à Bogota.

En définitive, plus de 28 personnes on été gravement blessées à l’oeil ou éborgnées entre le 28 avril et le 4 mai (11 heures).

 

LISTE DES VICTIMES

 

Personnes assassinées

23 Mai 2021 :

A Cali, Valle del Cauca, deux personnes non identifiées sont retrouvées mortes sur une route. Elles avaient été interpellées par la police avant leur dispartion.

22 Mai 2021 :

A Cali, Valle del Cauca :

  • Dans le quartier Calipso, John Erick Larrahondo, assassiné par la police d’un coup de fusil calibre 5,56.
  • Dans le quartier de la Candelaria, Breiner Chud Arango, 25 ans, est assassiné par des civils

20 Mai 2021 :

A Tuluá, Valle del Cauca, Julián Vallejo et Cristian David Orozco, 23 ans, sont assassinés par arme à feu par des civils qui voulaient forcer un blocage.
A Cali, Valle del Cauca, Vladimir Steven et Johan Ricardo Idrobo, sont tous les deux assassinés lors d’une attaque armé à un point de résistance Paso Del Comercio, les responsables ne sont pas identifiés à ce jour.

19 Mai 2021 :

A Cali, Valle del Cauca, dans le quartier CalipsoAngie Johanna Valencia Ordóñez est passée près d’une manifestation afin de regagner son domicile, elle est assassinée de trois balles par des policiers.

17 Mai 2021 :

A Yumbo, Valle del Cauca,  Jhon Alexander Yotengo Chaguendo, 22 ans, Michael Joan Vargas López, 23 ans et Maicol López Cano, 32 ans, sont tués par arme à feu par les ESMAD. (source). Ce jour là, à Yumbo,  il y aura en totalité 26 personnes blessées hospitalisées : 12 personnes blessées par armes à feu, 5 par armes blanches, 3 personnes intoxiquées par les gaz lacrymogènes et 6 autres personnes blessées. 

14 Mai 2021 :

 A Popayan, Cauca, Sebatiàn Munera, 22 ans, reçoit une grenade assourdissante tirée par l’ESMAD au niveau du cou, blessé à l’aorte il meurt des suites de sa blessure à l’hopital de Popayan. (pas identifié sur la vidéo mais les blessures concordent (source).

12 Mai 2021 :

A Popayan, Cauca,  dans la nuit du 12 au 13 mai, Alison, mineure, est arrêtée par l’ESMAD pour avoir simplement filmé une de leurs interventions, puis elle est conduite à 21h10 dans une unité de police judiciaire dédiée à “l’écoute des victimes”, l’URI (Unidad de Reacción Inmediata). Elle y sera agressée sexuellement et/ou violée par quatre agents de l’ESMAD avant d’être ensuite reconduite chez sa grand mère à 23 heures. Alison s’est suicidée le lendemain de l’agression.

Un adolescent de 14 ans reçoit une balle en pleine tête alors qu’il passe en vélo (source), et sur ce même compte twitter une personne signale la disparition de deux adolecents de 14 et 17 ans vus pour la dernière fois à Pampalinda. Nous n’avons pas de détails sur le responsable du tir fatal, à Buenaventura, valle del Cauca07 Mai 2021 :

07 Mai 2021 :

Héctor Fabio Morales, 24 ans, faisait partie des auxilaires médicaux qui aidaient lors des manifestations. Quelques minutes après la fin des manifestations, à quelques rues (Calle 17) du lieu de rassemblement principal,le parc Olaya de Pereira, Risaldara,  il est atteint de plusieurs tirs dont un à la tête. Les responsables seraient des groupes civils armés (source).

Dylan Fabriany Barbosa León, 27 ans, meurt d’un accident de moto avec le tank d’un ESMAD dans le Quartier Kennedy à Bogota. La famille ne croit pas la version policière du simple accident et demande la vérité sur la mort de Dylan (source

05 Mai 2021 :

La famille de Javier Alonzo Diaz, 52 ans, explique qu’il est sorti de chez lui car il a entendu des affrontements et était inquiet pour un de ses neveux prenant part aux manifestations. Il a vu un groupe de 8 jeunes qui étaient poursuivis par la police qui leur a tiré dessus. Javier a été assassiné d’une balle dans la tête par la police dans la Carrera 26H4 à Cali, Valle del Cauca . Son corps est resté plus de dix heures par terre dans une rue du quartier Los Lagos juste à côté de chez lui; selon la CTI de la defensoria (Corps Technique d’enquête du parquet général)  le corps ne pouvait pas être évacué tant que la manifestation se poursuivait.

Lucas Villa Velasquez est sur l’occupation du viaduc entre Dosquebradas et Pereira, Risaldara. A partir de 18h, la foule commence à se disperser et à 19h30, il ne reste d’un groupe de 6 personnes dont Lucas Villa Velasquez, 37 ans. Quelques minutes avant les tirs, on aperçoit Lucas et une autre personne recevoir de la nourriture venant d’une camionnette Duster blanche qui allait en direction Pereira-Dosquebradas. On aperçoit sur cette vidéo ce qui semble être un laser rouge (seconde 10) qui se pose sur la tête et les mains de Lucas. On voit également entre les secondes 1 à 8 un laser vert qui provient de l’autre coté de l’avenue sens Dosqeubradas-Pereira et qui signale les jambes de Lucas. Les manifestants se déplacent ensuite vers la séparation qui divise la double voie, un petit mur. Lucas donne là son dernier discours. Puis une moto Biwis arrive, on entend un cri “Hijueputa” suivi de 8 tirs. Selon un témoin, le tireur a dit “por estar bloqueando’ (pour bloquer). Lucas Villa Velasquez, Andrés Felipe Castaño et Javier Darío Clavijo sont touchés. Lucas était visible et remarqué lors des manifestations. Selon un des témoins, il aurait été suivi lors de la manifestation et une personne indique qu’ils etaient en train de le cibler pour le tuer. Selon l’hôpital Lucas a reçu 8 balles dont trois dans la tête, il restera en réanimation jusuq’au 10 mai, date de la déclaration de la mort cérébrale, l’arrêt des soins suivra le 11 mai. Durant la manifestation du 5 mai, le matin, une vidéo montre Lucas crier ““Nos están matando en Colombia” (source 123).

04 Mai 2021 :

Une Personne non identifiée qui apparait tuée sur une vidéo à Siloé, Cali, Valle del Cauca.

03 Mai 2021 :

A Cali, Valle del Cauca :

  •  A SiloéHarold Antonio Rodríguez Mellizo et  José Emilson Ambuila  prenaient part à la manifestation et ont été blessés par balle, ils arriveront à l’hopital sans aucun signe de vie. La Defensoria affirme que ce sont des tirs de l’ESMAD. (source 1 et 2) ; ). Kevin Antoni(o) Agudelo Jiménez, 22 ans, a lui aussi reçu une balle de l’ESMAD à Siloé sur la Carrera 52, dans le secteur de El Palo, il a été transporté à l’hopital mais décède des suites de sa blessure. (source).
  • Cristian Arturo Hinojosa Murillo, 26 ans est tué d’une balle par police,  sur la carrera 25L con calle 72U.
  • Dans le Secteur 14 de Calima à Cali, Nicolás Guerrero, 22 ans, prenait part à une veillée dans la nuit du 2 au 3 mai, en hommage aux personnes tuées lors des manifestations, qui s’est soldée par une dispersion violente de l’ESMAD avec gaz lacrymogène et arme à feu. Nicolas a été assassiné d’une balle dans la tête dans la Carrera 1. Nicolas était connu dans le monde du graffiti son alias était Flex (source).
  • Dans le quartier La Luna, une personne non identifiée et  Mauricio González Escobar, 25 ans, sont assassiné.e.s, les responsables ne sont pas identifié.e.s.

A Yumbo, Valle del Cauca,  des témoins auraient vu “des pillages” puis ont entendu des détonations et virent Wenseslao Solis Sanchez mortellement blessé par arme à feu (Carrera 5). La defensoria enquete pour voir si sa mort est en relation avec les revoltes.

02 Mai 2021 :

Un homme non identifié est tué au Parc de Jovita à Cali, Valle del Cauca, le responsable n’est pas identifié.

01 Mai 2021 :

A Cali, Valle del Cauca, Jeison (ou Yinson) Andrés Angulo Rodríguez, 24 ans est assassiné par arme à feu de la part de l’ESMAD au niveau de Carrera 1 con calle 76 secteur de Paso del Comercio.(source 12 , 3). Santiago Moreno Moreno, 23 ans, Yofri Esteban Cardona, 20 ans, et  Jhonatan Arlex Quiñones , 36 ans, sont assassinés les responsables ne sont pas identifiés.

A Ibague, Tolima, Santiago Andres Murillo, 19 ans, était avec un groupe d’environ 10 personnes dans la rue 60. Ils avaient décidé d’emprunter la rue 60 parce que dans la rue 37 il y avaient des tensions entre police et manifestants. Alors qu’ils marchaient, au niveau au centre commercial Multicentro, ils ont croisé des agents de l’ESMAD et un groupe de policiers motorisés. L’un d’entre eux tire sur Santiago Andres Murillo, la balle l’atteint au thorax. Il est ensuite amené dans une clinique où il décède une heure plus tard (source 1 , 2).

A Bogota, Daniel Alejandro Zapata, 20 ans, manifeste à Portal de Banderas dans le quartier Kennedy, un ESMAD lui tire un projectile dans la tête, projectile qui serait probablement une grenade lacrymogène. Il est hospitalisé et décède le 10 mai des suites de sa blessure.

A Madrid, Cundinamarca, dans le quartier Sosiego,   Brayan Fernando Niño Araque, 24 ans, et Elvis Vivas, 23 ans participaient  aux manifestations.  Brayan Fernando Niño Araque a reçu dans la tête un projectile lacrymogène tiré depuis un tank de l’ESMAD au coin de l’Avenue Calle 7 avec la carrera 20. On peut supposer que c’est une des cartouche de l’arme Venom Combined system que les ESMAD montent sur leur tank. Le 6 mai, un juge d’instruction ordonne la capture du major de la police Carlos Javier Arenas Nino pour son homicide (source 12).   Elvis Vivas est, quant à lui, arrêté et conduit au commissariat du quartier. Il y entre sans aucune blessure, les policiers l’ont violenté à l’intérieur du commissariat, sur la vidéo on l’aperçoit plein de sang (source), puis ils le jettent dans la rue. C’est un voisin, auxilaire médical, qui l’a ememné à l’hôpital local. Au vu de la gravité de ses blessures, il a été transféré à l’hôpital de Faca où il est placé en réanimation. Il décède des suites de ses blessures le 08 mai (source).

A Medellin, Antioqua,  Jefferson Alexis Marín Morales, 33 ans, a reçu un tir d’arme à feu lors d’une attaque de la police nationale au milieu de la calle 92 con carrera 84. Sur les vidéos, on voit clairement un policier degainer son arme et tirer vers les manifestants présents, de l’autre côté de la rue nous voyons un groupe d’environ 6 personnes qui évacuent Jefferson (source 12).

30 Avril 2021 :

A Cali, Valle del Cauca :

  • Dans le quartier El diamante, Edwin Villa Escobar et Einer Alexander Lasso Chará sont assassinés par armes à feu des ESMAD à quelques rues d’intervalle. (Edwin Villa Escobarsource 1 ; 2  ; Einer Alexander Lasso Chará : source ).
  • Dans le quartier Calipso, toujours à Cali, Rosemberg Duglas et Julia Navarrete sont assasssiné.e.s, le.s responsable.s ne sont pas identifé.s. La veille de ces deux assassinats, nous pouvons constater des tirs venant des rangs de policiers dans ce même quartier Calipso, calle 70, (source) et sur une autre vidéo on peut voir un policier de l’ESMAD projeter au sol un manifestant d’un coup de pied puis lui tirer a bout portant une grenade lacrymo dans le torse (source). Il est donc probable que ces deux personnes aient été tuées par la Police ou l’ESMAD.
  • Dans le quartier Poblado II,  José Augusto Ortiz Cortés a été poignardé par des civils qui prétendaient vouloir le voler (Carrera 28 D con calle 72 W).
  • Dans le quartier Villa del Sur, Kevin Yair González Ramos a été poignardé dans le quartier Villa del Sur Carrera 46 con calle 36. Le.s responsable.s ne sont pas identifié.e.s
  • Maria Jovita Osorio, professeure des écoles 73 ans a été assassinée par l’ESMAD, elle était chez elle en pyjama mais n’arrivait pas à dormir à cause des bruits de tirs et d’explosion provoqués par l’ESMAD. Une grenade lacrymogène a été tirée dans le patio de sa maison, et toutes les chambres ont été remplies de fumée. Cette grenade lacrymogène ne doit pas être tirée dans des lieux clos mais l’ESMAD avait déjà commis cette même infraction à plusieurs reprises lors des révoltes étudiantes de 2019. Ayant peur des bruits de violence à l’extérieur Maria Jovita Osorio n’a pas osé sortir dans la rue, et a appelé sa fille pour qu’elle vienne la chercher, elle a décrit au téléphone qu’elle narrivait pas à respirer, que ses yeux et sa bouche brulaient et qu’elle s’étouffait. Sa fille est arrivé rapidement sur les lieux et l’a conduite à la clinique Rafael Uribe. A 2h30, Jovita a fait un premier arrêt respiratoire qu’ils sont arrivés à stabiliser, mais le second deux heures plus tard lui sera fatal. (source).

A Pereira, Risaldara, Evelio de Jesús Flórez, 86 ans, meurt lui aussi des suites de l’inhalation de gaz lacrymogène tirés par un ESMAD dans sa maison dans le quartier La Virginia, Risaralda. (source 1 , 2).

29 Avril 2021 :

A Cali, Valle del Cauca :

  • Dans le quartier Brisas del Limonar, Calle 25, Daniel Felipe Azcárate Falla 19 ans est assassiné par arme à feu par des ESMAD. Selon un témoin, une confrontation a éclaté Daniel essaye alors de s’enfuir et est intercepté par un homme qui lui tire en plein coeur sans prononcer un seul mot.
  •  Dans le quartier Puerto Resistancia, Miguel Ángel Pinto Molina (ou Mona), 23 ans, est tué d’une balle dans l’abdomen lors d’affrontements entre policiers et manifestants (source).
A Yumbo, Valle del Cauca, Dadimir Daza Correa est tué par arme à feu par l’ESMAD dans la Calle 15 (source)
 

28 Avril 2021, premier jour de mobilisation sociale :

A Cali, Valle del Cauca :

  • Jeisson Garcia 13 ans : l’ESMAD lui a tiré dessus à plusieurs reprises. Il meurt des suites de ses blessures à l’hôpital Carlos Holmes Truillo.
  • Dans le quartier Puerto Resistancia, Marcelo Agredo Inchima , 17 ans manifestait à Puerto Resistancia (Calle 21 quartier Mariano Ramos), il a bousculé un policier en moto qui a sorti son arme et a tiré à plusieurs reprises sur Marcelo alors que celui ci s’enfuyait et était de dos au policier, jusqu’au tir fatal dans la tête (source)
  • Charlie (ou Yarli ?) Parra Banguera, 22 ans se rendait à un rassemblement/manifestation avec un ami, un affrontement entre police et manifestant s’est formé ( Esquina Calle 73 con Diagonal 26F1), et les policiers de l’ESMAD ont tiré sur les manifestants et ont assassiné Charlie/Yarli (source)
  • Cristian Alexis Moncayo Machado, 20 ans tué par balle d’une balle dans le torse ( Carrera 7R bis con calle 70) alors qu’il courait pour éviter l’attaque policière (ESMAD/police nationale) contre des manifestants qui “pillaient un commerce”en leur tirant dessus. Cristian court mais reçoit une balle dans la poitrine et meurt des suites de ses blessures à l’hopital. Pour justifier l’homicide, les policiers diront que Cristian aurait pris part aux dégradations, les procédé de criminalisation de la victime et de justification de la violence (pillage, violence) sont toujours les mêmes…
  • Pol Stiven Sevillano Perea18 ans était avec des amis et sa mère quand un homme avec une chemise rouge a commencé à lui tirer dessus (Carrera 27 con calle 106, secteur la Casona), il est mort des suites de ses blessures à l’hôpital.

A Neiva, Huila, Juan Diego Perdomo Monroy, 21 ans, manifestait, sur la vidéo disponible il est sur une place où il y a eu des affrontements entre police et manifestants, avant la prise d’images. Tout à coup, il s’effondre par terre et meurt. La seule source est une vidéo policière qui met en avant qu’il n’y avait pas, au moment précis du décès de tensions entre la police et les manifestants. Or, peu avant son décès, des gaz lacrymogènes ont été lancés et pourraient être la cause de l’arrêt cardiaque (source)

A Pereira, Risaldara, Brahian Gabriel Rojas López, 24 ans, était sur le pont Pont Francisco Jaramillo Ochoa à La Virginia où un blocage était en cours. Il était avec un de ses frères au milieu de la foule lorsque un ESMAD a attaqué les manifestants et à commencer à tirer sur elleux. La dernière fois que son frère aperçoit Brian, il n’est plus sur le pont mais sur la berge du fleuve. Une des versions supposées est qu’il serait tomber à l’eau suite à une blessure par balle mais rien n’est encore confirmé. Le corps de Brahian a été retrouvé dans le fleuve Cauca 3 mai à Irra à trois heures de Pereira.

A Bogota, Michel David Reyes Pérez prenait part à un blocage sur le secteur Kennedy et aurait demandé de l’argent contre le passage. Un commerçant du secteur a alors sorti son arme et l’a descendu.

 

 

,Quand maintien de l’ordre rime avec exactions et violences systématiques

Dans les différentes villes du pays, les collectifs contre les violences d’Etat et associations de défense des droits humains comptabilisent les cas de violences et d’exactions. Les personnes gravement blessées se comptabilisent par dizaines sur chaque journée de manifestation. Pour la seule journée du 9 mai à Cali, 12 blessés sont répertoriés suite à l’attaque de la Minga Indigena, dont Daniela Soto, leader du mouvement, blessée de deux balles dans l’abdomen et actuellement en réanimation entre la vie et la mort. Le 14 mai à Popayan, on recense plus de 40 blessés.

Certaines opérations sont menées conjointement par les ESMAD et des milices armées en civil, comme dans le barrio La Luna à Cali le 7 mai, où des tirs à balles réelles sont d’abord dénoncés par les habitant.e.s, avant que des blessé.e.s par balle ne soient transporté.e.s hors du quartier (source 1, 2).

La violence aveugle des forces de police se manifeste par des scènes régulières au cours desquelles celles-ci s’acharnent sur des civil.e.s.

Quelques exemples :

Le 30 avril à Cali, alors qu’un manifestant tente d’aider un agent de l’ESMAD tombé à terre dans la rue 7, les collègues du policier l’attaquent et l’un d’entre eux tire une grenade lacrymogène en tir tendu en direction de sa tete alors qu’il s’enfuit, il est blessé légérement à la tête. Dans le quartier du 12 de Octubre à Cali (localisation exacte : Carrera 29 con calle 53), un policier pointe un fusil d’assault sur des civils qui le supplient de ne pas tirer, puis sur la vidéo qui suit une femme est blessée par balle aux jambes

Le 1er maiDaniel David Meléndez est éborgné par l’ESMAD à Popayan. A Bogota, sur l’avenue Calle 13, un jeune homme est au sol, inconscient au milieu d’un groupe de policiers, qui le déclarent mort. Dans la carrera 8 à Pereira, une équipe de policiers s’en prend violemment à des personnes réfugiées dans un escalier en contrebas de la chaussée, singeant les manifestants en criant “Resistencia”. 

Le 3 mai, à Manizales, la police envoie des grenades lacrymogènes dans un bus fermé où des personnes sont à l’intérieur. 

Le 4 mai à Bogota, dans le barrio Villas de Granada de la localité de Engativ (Calle 77 con carrera 113), des policiers enlèvent un jeune sur une de leur moto, tandis qu’il crie son nom aux témoins.

Le 5 mai, à Cali toujours, Cristian Barrios, 24 ans, est propulsé au sol par un canon à eau, et tandis que des personnes tentent de s’activer pour le secourir, le tank de l’ESMAD s’évertue à viser le corps inanimé de Cristian, qui finira dans le coma suite à un traumatisme cranien (source 1, 2). Le même jour, à Pasto Narino, 3 hommes sont blessés par balle par l’ESMAD au niveau de la tête, tandis que sur l’occupation du viaduc entre Dosquebradas et Pereira,  Andres Felipe Castaño, 17 ans, reçoit 4 tirs dans l’abdomen et dans les jambes. Il arrive à la clinique en état de choc hémorragique et se trouve actuellement en réanimation. Au même endroit, Javier Darío Clavijo est blessé par une balle à la jambe. A Vallepudar, un policier court en tirant avec son revolver dans la rue 18 A. A Pasto Narino, dans la rue 18, un groupe de 10 policiers se regroupe à un coin de rue et l’un d’entre eux tire une grenade lacrymogène en tir tendu vers une foule (que l’on ne voit pas sur la vidéo mais que l’on entend). A Cali sur la Carrera 52, un policier avec un gilet pare-balles et une cagoule se tient derrière un agent de l’ESMAD et tire avec une arme à feu, tandis que d’autres policiers lancent des pierres.

Le 14 mai à Popayan, la police tire à balles réelles, tandis qu’un groupe de policiers essaie d’écraser des manifestants à l’aide du canon à eau. Le lendemain, à Popayan toujours, 15 nouvelles personnes sont portées disparues à la suite des manifestations…

Le 20/05/21, au soir, les médias et les ONG arrivent à entrer dans l’Exito (supermarché) du quartier Calipso. Depuis la veille, une violation des droits humains où des cris et des appels étaient entendus était supectée dans le supermarché mais l’entrée leur était refusé. A leur entrée dans le lieu, ils découvrent des tâches de sang, et des traces sur les murs et sur le sol. Cela confirme la thèse que ce supermarché a servi de lieu de rétentions et de tortures policières contre les manifestants. L’appel au boycott d’Exito est lancée. Les manifestants demandent l’accès aux images des caméras de vidéosurveillance présentes à l’intérieur. 

L’association Temblores ONG, qui établit des bilans réguliers des violences policières grâce à la mise en place de la plateforme de signalement GRITA, recensait (au 13 mai 2021) 2110 cas de violences policières entre le 28 avril et le 12 mai 2021, comprenant 362 victimes de violences physiques, 39 homicides, 1055 détentions arbitraires, 442 interventions violentes, 30 personnes blessées à l’oeil, 133 cas de tirs à balles réelles et 16 victimes de violences sexuelles. La même organisation recensait 639 homicides commis par la force publique entre 2017 et 2019, tous contextes confondus. Il faut se rappeler également qu’entre 2016 et 2019, plus de 1000 militant.e.s et défenseur.e.s des droits humains ont été assassiné.e.s en Colombie. (source : 1, 2 et 3)

Alors que les preuves et témoignages s’accumulent, rien ne permet plus de distinguer les ESMAD des escadrons de la mort ou des milices paramilitaires d’extrême-droite qui imposent la terreur à travers la Colombie et l’Amérique du Sud depuis des décennies. Il n’est jamais inutile de rappeler que les élèves des écoles militaires et de police aux Amériques ont longtemps été inspirés et formés aux méthodes de la contre-insurrection développées et mises en pratique lors des guerres de décolonisation d’Indochine et d’Algérie. La France et les Etats-Unis porteront une responsabilité éternelle dans l’exportation de la violence coloniale et du fascisme à travers le monde. Et pour celleux qui en doutent, rien ne vaut mieux que le livre et le documentaire de Marie-Monique Robin, Les escadrons de la mort, l’école Française (4 parties)

En terminant cet article, nous avons une pensée particulère envers chaque famille de victimes, mais aussi pour tou.te.s nos ami.e.s qui luttent activement pour des conditions de vie dignes.

Et comme le dit une pancarte :

Cali ya no huele a cana, tabaco y brea sino a dignidad, valentia y resistancia.

La Colombie est aujourd’hui synonyme de dignité, courage et résistance. 

Cuidense mucho y fuerza para la lucha.

La Colombie pleure, mais ne se rend pas.

Pour aller plus loin :

Nous conseillons le travail du collectif Sin Miedo a las calles qui produit des brochures très complètes, qui peuvent servir en ce moment en Colombie (brochures des armes de la police colombienne, brochures d’auto défense en manifestations, judiciaire et digitales etc…) : Sin Miedo a las Calles

La liga contra el silencio – Site Internet / FacebookTwitter

Puro Veneno – Facebook / Instagram / Google Drive

Temblores ONG – Site Internet / Instagram /  Facebook / Si vous êtes témoin ou victime de violence policière voici le numéro à joindre en Colombie : 313 677 9720

Pour les détails sur les victimes : Cerosetenta ; Indepaz

Nous tenons à remercier Patatacaricaturas qui nous a permis de diffuser ses illustrations pour dénoncer les violences étatiques en Colombie :  Instagram – @PatataCaricaturas ; email : patatadibuko@gmail.com