Traduction du texte en anglais publié initialement par Care4Calais : https://www.facebook.com/care4calais/posts/3156538001045802?__tn__=K-R
N.B. : Le titre de l’article ci dessus a été rajouté par nous.
» Travaillant à Calais depuis quatre ans et demi, j’ai vu beaucoup de choses, mais hier, un fait m’a ramené aux pires années : 2015-2016.
Comme beaucoup de services ont fermé, nous emmenons des personnes à l’hôpital afin qu’elles aient accès à un soutien médical. C’est difficile car nous sommes une petite équipe très occupée.
Nous avons été appelés afin d’aider un jeune homme qui avait été aspergé en plein visage de gaz CS par la police.
Je ne m’inquiétais pas plus que ça car l’usage du gaz CS est pratique courante à Calais.
Mais, en m’approchant, j’ai pu constater, plutôt que les yeux rouges et le visage bouffi auquel je m’attendais, de graves brûlures couvrant la moitié de son visage, avec une peau couverte de larges cloques, et ouverte, des lambeaux de peau peler en arrière.
Cela semblait incroyablement douloureux.
En faisant une recherche sur Google, j’ai constaté que le gaz CS est classé comme arme chimique.
Comme nous étions au milieu d’une distribution, il nous était impossible de partir immédiatement.
Tia a appelé une ambulance.
La personne qui a répondu lui a dit qu’il n’y avait pas besoin de consulter un médecin et qu’il fallait simplement rincer à l’eau froide.
Nous avons essayé de lui expliquer à quel point c’était grave, mais elle est resté catégorique.
Ensuite, nous sommes allé chercher des vêtements propres (les siens étaient plein de gaz) des lingettes, de l’eau fraîche, de la nourriture, de la crème pour les brûlures et nous sommes retournés le voir urgemment.
Quand je suis revenu, j’avais mal pour lui rien qu’en regardant son visage.
Je lui ai demandé gentiment s’il me laisserait prendre une photo.
Avec tout ce qu’il souffrait, je pensais qu’il ne voudrait pas forcément mais il m’a dit que ça ne le dérangeait pas.
J’ai envoyé la photo à un ami médecin aux Pays-Bas. Sa réponse a été immédiate et sans appel – emmenez-le à l’hôpital MAINTENANT. A ce moment, j’ai su que j’avais eu raison de demander.
Q que nous rentrions au camp, la seconde dure réalité s’installe. tout son visage et lui ont donné de puissants analgésiques, bien que j’aurais préféré qu’ils prennent la décision, au vu de son état, de le l’hospitaliser.
Lorsque nous rentrons au camp, la dure réalité s’installe.
Normalement, quelqu’un dans cet état aurait du rester avec nous quelques nuits, ou nous aurions pu le placer dans un hôtel.
Il souffrait encore beaucoup et les brulures et les plaies ouvertes sur son visage devaient être tenue à l’écart des couvertures sales.
Mais maintenant, avec le Covid-19, nous sommes à court d’options.
On ne pouvait rien faire de plus. C’était notre unique option.
Comment cela s’est-il produit ? Qu’est-ce qui a mené à cet événement ? Que s’était-il passé ?
Nous lui avons demandé, et il nous a répondu qu’il marchait sur la route près du camp, lorsque la police l’a attaqué sans crier gare. Combien de personnes croiraient cela ?
Cet homme, avec qui j’ai passé du temps, est incroyablement doux, stoïque et humble. Il ne m’a pas semblé être un fauteur de trouble, un criminel ou encore un rebelle.
Quel acte aussi terrible soit-il mérite une punition aussi cruelle ?
Depuis le début de la crise du Covid, nous recevons de plus en plus de signalements de violence policière, une augmentation de la fréquence mais aussi de la sévérité de celles-ci.
Nous n’avons malheureusement pas les ressources pour pourvoir enquêter ou les vérifier. Nous ne pouvons que témoigner de l’augmentation du nombre de rapports.
Une bonne action pour terminer.
Des personnes iraniennes sont récemment arrivées au Royaume-Uni. L’une d’entre elles m’a envoyé son téléphone mobile afin d’aider quelqu’un qui en aurait besoin ici – « Je sais que vous le donnerez à quelqu’un dans le besoin ». C’est un beau smartphone – un Samsung.
L’homme, qui avait été brulé, n’avait pas de téléphone.
Nous avons dû appeler son ami lorsque nous sommes allés le chercher.
Nous lui avons donc donné le téléphone de la personne iranienne aujourd’hui. Ca l’a rendu heureux. Je ne suis pas sûr que quelqu’un puisse comprendre la valeur que peut avoir un smartphone pour quelqu’un qui n’a jamais eu. C’est une bonne chose. Ça ne vaut pas votre visage mais c’est quand même une bonne chose.
Vous pouvez appuyer notre appel urgent pour que les réfugiés puissent traverser cette terrible période : care4calais.org/emergency-appeal/ «
TEXTE ORIGINAL :
Working in Calais for four and a half years I’ve seen a lot, but yesterday something happened that took me back to the worst of 2015/16.
As many services have shut down we‘re taking people to hospital to access medical support. Its hard as we are a small team and busy. We were asked to help a young man who had been sprayed in the face with CS gas by the police.
I was not alarmed as this is so common in Calais, but as I got closer I could see, rather than the red eyes and puffy face I expected, serious burns covering half his face, with skin that was badly blistered and broken and had large sections peeling back. It looked incredibly painful. A google search told me CS gas is classed as a chemical weapon.
We were in the middle of a distribution and it was impossible to leave immediately. Tia phoned an ambulance. She was advised that he did not need to see a doctor and should just keep rinsing with cold water. We tried to explain how bad it was but they were adamant.
Afterwards we organised clean clothes (his were soaked in the gas) body wipes, fresh water, burn cream and food and rushed back to see him. But on return It hurt me just to look at his face. I gently asked if he would let me take a photograph. I though he’d been though enough but he didn’t mind. I sent it to to my friend, a doctor in the Netherlands. Her reply was immediate – take him to hospital NOW. I was so glad I’d asked.
The hospital were good. They applied a thick white mask to the whole of his face and gave him strong painkillers, although I would have liked them to keep him in. As we drove back to the camp the second hard reality set in.
Normally someone in this condition could have stayed with us for a couple of nights, or we could have placed him in a hotel. He was still in a lot of pain and the broken skin on his face should be kept away from dirty blankets. But now with Covid-19 we are out of options. There was nothing more we could do.
So how did this happen? What led to this event? When asked he said he was walking down the road by the camp and the police attacked him unprovoked. How many people would believe that? But this guy I spent time with and he is incredibly gentle, stoic and humble. He did not strike me as in any way a trouble causer, criminal or rebel. And what terrible deed would you have to do to deserve a punishment such as this?
Since the start of the Covid crisis we have heard increased reports of police violence, both of incidence and severity. We do not have the resources to investigate or verify this, we can only testify to the increase in reports.
One nice thing on which to end. Some Iranians recently reached the U.K. One of them sent me his mobile phone to help someone left behind – ‘I know you will give it to someone in need’. It’s a nice smartphone – a Samsung.
The guy with the burns did not have a phone. We had to call his friend when we went back to find him. So we gave him the Iranian’s phone today. It made him happy. Im not sure someone at home can know what a big thing it is to give a smartphone to someone who has never had one. But it is a good thing. Not worth your face. But still a good thing.
Please support our urgent appeal to see refugees through this terrible time