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Le 12 Janvier 2019, Lilian était aux Halles à Strasbourg pour s’acheter une veste. Puis, il sort attendre le tram avec un ami. Durant l’attente, ils entendent des cris et décident d’aller voir ce qu’il se passe. C’est une manifestation des gilets jaunes. Lilian, âgé de 15 ans à l’époque, décide alors de s’éloigner de la manifestation. C’est lorsqu’il est à distance, qu’un policier lui tire dessus en plein visage avec le LBD 40. Lilian a la mâchoire broyée par l’impact.


Après avoir gardé les broches et bu du liquide pendant six semaines, j’aurai normalement une rééducation et je pourrai remanger… retrouver mon nerf. Ma mâchoire. Mon visage. Pour récupérer ma mâchoire, ça devrait aller. Mais pour mon nerf, c’est pas sûr.“, Lilian


Dans un premier temps, les mensonges grotesques des policiers tentent de criminaliser la victime en la plaçant, bien entendu, dans un groupe de manifestants violents, et nient l’implication du LBD. Ils vont jusqu’à insinuer que Lilian aurait pu se blesser seul en tombant… Cette version ne tient pas face aux vidéos qui démontrent clairement que Lilian se tenait en marge de la manifestation lorsqu’il est victime du tir. La mère de Lilian contredit, elle aussi, directement cette affabulation et se bat contre la criminalisation de son fils. Durant ces onze mois, elle a porté un combat, celui de la vérité et de la justice auxquelles elle aspire, quand bien même l’impunité était déjà suggérée par le contenu initial de l’enquête.

L’enquête IGPN établit quant à elle de manière certaine que l’arme utilisée contre Lilian était bien le LBD, que l’adolescent ne participait pas à la manifestation, mais justifie l’usage du LBD par les policiers, ce jour là, par la légitime défense au vu du contexte “violent” et conclut à l’impossibilité d’identifier l’auteur du tir à l’origine des graves blessures subies par le lycéen. La plainte est donc classée sans suite.

Il faut rappeler que ce jour là le LBD n’a pas blessé un mais deux enfants de 15 ans qui se trouvaient tous les deux, en marge de la manifestation, aux abords du pont Kuss à Strasbourg : Lilian et une deuxième personne qui a été atteinte par un tir dans la cuisse et qui a elle aussi déposé plainte.

L’IGPN comme à son habitude sert l’impunité policière. Les vidéos sont pourtant claires on distingue l’emplacement exact du policier lors du tir. #selonlIGPN avoir la localisation exacte de l’agent ne sert à rien du tout pour l’identifier. Douce ironie.

Onze mois plus tard, les séquelles physiques sont présentes. Lilian a perdu la sensibilité au chaud et au froid au niveau de la lèvre, côté droit, et son visage est marqué par une cicatrice importante sur son visage qui ne pourra être opérée, à visée réparatrice, qu’après la fin de sa croissance.

Au delà de l’impact physique, il y a celui psychologique. Suite à cette épreuve, Lilian a choisi de s’éloigner de Strasbourg pour cela il a déménagé chez son père. Il a abandonné le basket, son sport favori pour éviter les chocs… Les longs mois de convalescence ont provoqué le redoublement de sa classe de seconde. Comme le souligne la mère de Lilian, “Rien ne sera plus jamais comme avant


Une mutilation ce n’est pas seulement ce que l’on voit, c’est tout ce qui se brise à l’intérieur de manière invisible. Une mutilation c’est chaque répercussion qu’elle entraîne sur la famille, sur les proches, sur l’avenir ou le devenir professionnel. Une mutilation c’est une vie qui s’arrête pour en commencer une différente. Une mutilation devrait être punie à la hauteur des conséquences subies par la victime. Une mutilation ne devrait pas se conclure par l’impunité policière criminelle.


Suite à cet évènement le père de Lilian s’est engagé dans le combat contre l’utilisation des lanceurs de balles de défense (LBD) par les forces de police. Nous reprenons ici ses mots que nous avons trouvé justes : ” Il a répondu par écrit, explique son père. Il ne peut toujours pas parler. Il a été blessé à la machoire, mais à quelques centimètres près, c’était l’oeil, ou pire, et il perdait la vie. C’est une abberation totale, ces armes ont les mêmes viseurs que les Famas, il faut les interdire. On dit que ce sont des armes non létales, mais elles peuvent être létales quand elles sont tirées à moins de 5 mètres. Pour moi, ce ne sont plus des armes anti-émeute, ce sont des armes d’attaque.

Il est d’urgence publique de désarmer la police, celle qui blesse, mutile et tue, et qui attaque des enfants.

Crédit photo : france3-régions.francetvinfo.fr